Prière et réparation

10 mars 2022

Au cœur du Carême, le troisième dimanche a été choisi par les évêques de France pour que nous puissions, porter dans notre prière communautaire – avec toutes les autres paroisses de France – l’intention des personnes qui ont été victimes de violences et d’agressions sexuelles, d’abus de pouvoir et de conscience au sein de l’Eglise dans notre pays et dans notre diocèse. Voici quelques points d’éclairage pour que nous puissions nous y préparer.

Dans le prolongement de la soirée du 16 novembre dernier, je vous invite à une veillée qui aura lieu au presbytère d’Orange le vendredi 18 mars à 20h30 à la salle paroissiale. Nous regarderons ensemble la vidéo-témoignage d’une victime, Véronique Garnier. Puis nous aurons un temps d’échange avant de lire quelques textes de réflexion et prier...

Samedi 19 et dimanche 20 mars, lors des messes dominicales, nous commencerons la messe avec le chant :

Nous formons un même corps, nous qui avons part au même pain ;
et Jésus-Christ est la tête de ce Corps, l’Eglise du Seigneur.

L’acte pénitentiel du début de la messe sera développé : nous prendrons le temps de nous mettre à genoux et d’entrer dans un grand silence. Nous nous relèverons pour exprimer notre demande de pardon au Seigneur et, ainsi, reconnaître que nous n’avons pas mesuré, à cause de la dureté de notre cœur, la gravité de ces atteintes.

Dans la prière universelle, nous demanderons une plus grande charité : nous demanderons au Seigneur son aide pour que, tous, membres du même Corps du Christ, nous soyons respectueux des personnes dans leur intégrité.

Comment nous sentir concernés par cette démarche ? Le péché n’est-il pas un acte personnel ? CEC 1868
A moins d’avoir nous aussi participé à des abus, à moins de les avoir cachés ou d’avoir protégé ceux qui ont fait le mal (cf. Catéchisme de l’Eglise Catholique n°1868), notre responsabilité n’est pas engagée.

Pour nous sentir concernés par cette démarche, rappelons-nous que tout péché porte atteinte à la solidarité humaine (cf. Catéchisme de l’Eglise Catholique n°1872). Tous les péchés - même et surtout les plus cachés - viennent blesser toute l’Église : quand un membre souffre, tous les membres souffrent.

Mais… l’Eglise n’est-elle pas sainte ? Oui, elle l’est : « je crois, nous croyons en l’Eglise Sainte » : elle est l’épouse du Christ qui l’a aimée et l’aime, Jésus qui a donné sa vie pour nous afin de se présenter son Eglise comme une épouse sainte et sans tâche. Mais si l’Eglise est sainte, elle est encore imparfaite. Ce n’est pas contradictoire.

A chaque moment de son histoire et jusqu’à la venue du Christ dans la gloire, l’Eglise est imparfaite dans ses membres qui n’accomplissent pas les commandements de Jésus qui nous appelle à la conversion et à la charité. Elle est ce champ où se côtoient l’ivraie et le bon grain, les justes et les pécheurs. Ce n’est qu’au jour du Jugement, quand Jésus aura fait le tri entre les bons et les mauvais, que la perfection de l’Eglise sera accomplie.

Pourtant, depuis son commencement sur la Croix et jusqu’à aujourd’hui, la vocation de l’Eglise est d’être le visage du Christ pour le monde. Quand nous constatons que ce visage est défiguré – et il l’a été très gravement – par le péché de ces abus, faisons la vérité et sachons le reconnaître. C’est la vérité d’une Eglise pénitente dont les membres se reconnaissent pécheurs devant Dieu et devant leurs frères : par solidarité (traduction simple de la communion des saints), chacun de nous peut demander pardon au Seigneur et se tourner vers ses frères et sœurs victimes pour leur dire : « ce que vous avez subi me touche aussi parce que nous sommes membres les uns des autres. » Nous aurons aussi peut-être à coeur de leur demander pardon.
Dimanche prochain, l’Église nous offre les moyens de réparer – un peu – les graves fautes commises. Ne craignons pas d’apporter notre contribution à cette prière de réparation. Faisons l’acte de foi que notre démarche fera du bien à toute l’Eglise puisque ses différents membres auront ainsi le souci les uns des autres. Cf. 1 Cor 12, 25
La miséricorde n’est pas de l’ordre d’un pardon aveugle, mais d’une réconciliation qui suppose un rapprochement vis-à-vis des personnes qui ont été offensées, la mise en lumière de la vérité et surtout… la grâce de Dieu qui donne à ses enfants la parole du pardon et de la réconciliation. Notre Eglise n’en sera que plus belle et pacifiée.

Père Michel BERGER, curé