Dégoûté de la vie... et pourtant dans la foi et l’espérance

5 février 2021

comme Job, de jour comme de nuit

De jour…  Pire qu’un ouvrier agricole dont la journée est déjà harassante parce qu’il est brûlé par le soleil ou rincé par la pluie, Job se compare à un esclave qui supporte le poids de la corvée.

De nuit… Job exprime sa souffrance… la nuit, tous les problèmes grossissent ! Au dire des médecins, même la souffrance physique est plus vive…Jusqu’à l’aube… des cauchemars… Le bonheur… ? pas pour moi… !

Le bonheur ? donnez-moi au moins le repos… et si possible, un peu de joie, un peu de douceur, un peu de saveur !

Dans la Bible, Job hurle la souffrance de l’homme. Il la crie à qui veut l’entendre et tout d’abord à ses trois amis qui sont venus vers lui alors qu’il est blessé à vif, assis sur la cendre : De loin, fixant les yeux sur lui, ils ne le reconnurent pas. Alors ils éclatèrent en sanglots. Chacun déchira son vêtement et jeta de la poussière sur sa tête. Puis, s’asseyant à terre près de lui, ils restèrent ainsi durant sept jours et sept nuits. Aucun ne lui adressa la parole, au spectacle d’une si grande douleur. (Job 2, 11 - 13)

Job rompt le silence. En disant sa souffrance, il réalise très vite qu’il est seul  : ses amis sont bien là, mais ils ne l’écoutent pas vraiment. Au contraire, ils l’accusent. Job ne se démonte pas : au-delà des hommes, c’est le cœur de Dieu qu’il va chercher à trouver. Job prie. Il essaie de ‘résoudre’ son problème dans la prière. En fait, il ne le résout pas car la prière n’est pas un sortilège. Tout au moins, Job confie son problème au Seigneur… il est en conflit avec Dieu, il est en conflit avec lui-même, il se confie à Dieu… jour et nuit, tout au long de la nuit, jusqu’à l’aube…
« Souviens-toi Seigneur… ma vie n’est qu’un souffle, je ne verrai pas le bonheur. » Job, dégoûté de la vie… !

Dans la page d’Evangile proclamée ce dimanche (Mc 1, 29- 39), nous voyons que Jésus ne reste pas insensible à la souffrance des hommes et des femmes dont il partage la vie. C’est d’ailleurs une femme qu’il va guérir en tout premier. Il calme sa fièvre. Il accueille tous les malades et guérit toutes sortes de maladie. Mais le Cœur de Jésus est tout particulièrement sensible à la souffrance causée par le mal qui aliène l’homme. Jésus s’arrête devant toutes les situations, quelle que soit la blessure : mentale, psychique ou spirituelle. Jésus libère tous ceux qui sont possédés par des esprits mauvais, ceux qui, pour une raison ou une autre, se sont laissés piéger par les ténèbres quand ce n’est pas par l’ange des ténèbres.

Au terme de sa vie terrestre, Jésus a voulu être cloué à la croix tant pour le mal que nous subissons que pour le mal que nous commettons. La croix paraît comme un échec et Jésus a très bien pu reprendre les paroles de Job ou celle de tous les serviteurs souffrants que nous sommes : Seigneur, tu me sondes et me connais ; mes chemins te sont tous familiers.

Tu as mis sur moi ta main. Où irai-je loin de ton esprit, où fuirai-je loin de ta face ? Si j’escalade les cieux, tu es là, qu’au plus profond de la terre je me couche, te voici. Je dirai : « Que me presse la ténèbre, que la nuit soit pour moi une ceinture » ; même la ténèbre n’est point ténèbre devant toi et la nuit comme le jour est lumière. (Psaume 139).

Y-a-t’il une bonne nouvelle ? Oui, car bien avant l’aube, Jésus sortit dans un endroit désert, et là il priait. Avec quels mots priait-il ? L’Evangile ne le dit pas. La prière de Jésus n’est pas une prière recette, elle n’est pas un sortilège. Elle est une prière qui se confieune prière source… une prière dans laquelle l’homme découvre qu’il n’est pas orphelin.

Dans la prière de Jésus, je découvre que j’ai reçu la vie comme un cadeau, que quelqu’un m’aime, que j’ai du prix aux yeux de Dieu, que ma vie a un sens, un sens à découvrir, un sens à construire… que Dieu respecte ma liberté, mes « oui » comme mes « non »…

Dans la sagesse du christianisme, dans le message de l’Evangile accueilli avec intelligence, je découvre la présence de Dieu aux origines de la vie… tout comme sa présence au terme de la vie… et dans l’au-delà… mais dans la prière, je découvre Dieu vivant au cœur de la ma vie

La prière ne résout pas immédiatement et définitivement tous nos problèmes… Chacun de nous pourrait témoigner qu’il traverse encore des épreuves, des doutes et des nuits… Si la prière n’apporte pas la solution à tous mes problèmes, elle me permet néanmoins d’être avec le Christ, avec Jésus, au plus profond de la nuit… pour le rejoindre dans sa prière. 

Si la croix conduit Jésus au tombeau, elle ne l’y enferme pas définitivement : au matin de Pâques, la pierre est roulée et le tombeau est vide. Il est vainqueur de la mort ! Il est notre Espérance ! Rien ne peut désormais nous séparer de son amour.

Il peut nous comprendre et nous guérir pour le mal subi car Il souffre avec nous. Il peut aussi nous pardonner le mal commis car il souffre pour nous. En toutes circonstances, Jésus est avec nous.

 Père Michel BERGER, curé

Job 3